Critique: The Haunting of Hill House de Mike Flanagan (Série Netflix)

C’est, cette fois, une série qui sera traitée. L’importance de ces dernières dans le paysage culturel n’ayant fait que grandir depuis le début de l’essor des plateformes de streaming.

Nous suivons les membres de la famille Crain (les enfants : Steven, Shirley, Luke, Theodora/« Theo », Eleanor/« Nell » et le père : Hugh) dans leurs vies respectives. Tous sont troublés par différents problèmes personnels (addiction à l’héroïne pour Luke, la difficulté à s’ouvrir aux autres pour Theodora par exemple), des visites de fantômes plus ou moins régulières mais aussi, et surtout, par le souvenir de ce qui s’est passé l’été 1992, au manoir Hill House. Chaque personnage gère individuellement et à sa façon les souvenirs de cette période trouble, d’où leurs problèmes personnels.

 Le tout nous est raconté via un montage parallèle avec les fameux évènements de Hill House ainsi que la période d’entre-deux (entre 1992 à Hill House et le présent) sur lesquels nous revenons de manière fragmentée et non-linéaire.

Court avis sur la série

Sur les environs 10 heures de la saison, 8 sont excellentes, servies par une mise en scène travaillée, des personnages attachants, de très bons acteurs et du drame bien écrit. Rien que la narration, qui ne nous perds jamais malgré les constants allers-retours, entre parfois 4 périodes temporelles différentes dans le même épisode, témoignant à elle seule d’un savoir-faire exemplaire de la part de Mike Flanagan. Le réalisateur du récent (et excellent) Doctor Sleep a géré cette série tel un véritable auteur : créateur de la série, donc rédacteur de la bible (le texte englobant l’histoire, les intentions et donnant le « la » pour la série) mais aussi réalisateur de tous les épisodes et (co)scénariste sur 4 d’entre eux.

Mais il y a environ 2 heures qui peuvent être difficiles à digérer. Elles aboutiront soit à un rejet complet de la série, soit à une admiration (voir adoration) soit à un sentiment d’incompréhension globale. Les 2 heures en question étant les suivantes : 1 heure si on compile des scènes spécifiques étalées sur toute la saison et 1 heure pour l’épisode final.

Comme vous l’avez probablement compris, ces 2 heures sont déterminantes dans l’appréciation globale de la série car elles sont supposées être les moments de révélations, répondant aux nombreuses questions s’empilant au fur et à mesure que l’intrigue avance.

Et les réponses sont… particulières.

Analyse Détaillée

Pour les lecteurs un peu plus assidus, qui souhaitent savoir plus précisément de quoi il en retourne avant de voir la série (ou après ?). Analyse garantie sans spoilers.

Autant une série d’horreur qu’un drame familial…

Il est important de d’abord noter que The Haunting n’est pas une série d’horreur dite « pure ». Il ne faut donc pas s’attendre aux montagnes russes cauchemardesques d’un James Wan (Conjuring 1et 2, Insidious 1 et 2, Saw etc…), ni à l’ambiance paranoïaque d’un Carpenter (Halloween, In the Mouth of Madnes, etc…) ou autres styles d’horreur centrés presque uniquement sur le sentiment de peur. The Haunting fait partie des nombreux enfants de The Exorcist (certainement pas le premier de sa variante d’horreur mais l’œuvre qui y fait autorité en tout cas). A savoir l’horreur mixée avec le drame humain, le plus souvent familial.

Nous faire peur fait bien partie du cahier des charges, la série a bien des moments qui donneront des cauchemars à certains mais le but est aussi de suivre les personnages dans leurs parcours et leurs problèmes personnels respectifs. Les deux aspects de la série (l’horreur surnaturelle et le drame familial) sont évidemment liés au bout du compte

Il est juste important d’être au courant du « type d’horreur » dans lequel on met les pieds. L’horreur est l’un des genres les plus difficiles à appréhender sans le rejeter par moquerie ou parce qu’on s’y ennuie quand on ne s’y est pas préparés un minimum (du moins si vous n’êtes pas particulièrement amateur du genre). Le second cas (l’ennui potentiel) concerne notamment The Haunting et son horreur mélangée au drame (qu’on peut aussi rapprocher de Hereditary pour une référence plus contemporaine).

En tout cas The Haunting s’en sort très bien dans les deux domaines. Le drame est bien ficelé et développé (la partie « horreur » sera abordée plus tard dans la critique). Chaque personnage a son arc à accomplir, son problème à résoudre plus ou moins directement lié aux évènements de Hill House. Problèmes que la série traitera en détail, abordant les thèmes de l’addiction, du deuil, du renfermement sur soi, la culpabilité etc…

Le côté un peu « systématique » de l’histoire (1 personnage amenant à chaque fois 1 problème personnel et 1 problème commun à tous, à savoir les évènements du manoir Hill) risque de donner l’impression que la série en fait trop et joue la carte du tire-larme avec cette famille dans laquelle tout simplement rien ne va de A à Z.

Mais cette impression devrait disparaître au fur et à mesure que l’on avance et que l’on découvre ce que chaque personnage a vécu à Hill House. Les évènements en question sont suffisamment traumatisants pour, en effet, créer une famille aussi dysfonctionnelle et composée d’individus qui se sont tous créé un trouble en plus pour gérer le traumatisme de ces évènements.

Les deux réelles ombres au tableau étant peut-être les personnages de Shirley et Eleanor.

Le souci d’écriture de la première est qu’on ne comprend le fond de son problème qu’au moment de sa résolution au tout dernier épisode, ce qui diminue forcément la force émotionnelle de son parcours (surtout en comparaison aux autres personnages). Shirley a un développement le long de la série et on comprend bien comment elle est devenue ce qu’elle est dans le présent. Mais c’est comme si Flanagan s’était rendu compte trop tard qu’il avait oublié de nous donner l’information essentielle pour qu’on comprenne quel est le mal-être à résoudre. Il finit alors par nous l’expliquer à la va-vite à la fin juste avant la conclusion.

A gauche, Shirley et n’espérez pas apprendre qui est l’homme à droite avec un verre (il apparait à quelques reprises dans la série) avant la fin l’épisode final. Et là est le problème, on l’apprend beaucoup trop tard.

Le problème d’écriture du personnage d’Eleanor est que son histoire repose presque entièrement sur les symboliques de la série autour des fantômes et du déroulement du temps. On abordera ces dernières plus tard dans la critique. Mais pour l’instant vous pouvez retenir que le souci est le moment du dévoilement de l’histoire d’Eleanor et de la « Bent Neck Lady » qui risque plus de créer un sentiment de « wtf ?! » chez vous qu’un sentiment de compréhension. Et plus que la fin, c’est en comprenant la symbolique globale que l’on comprend pourquoi l’histoire d’Eleanor est aussi …particulière.

Voici Eleanor (ou « Nell »), elle n’est pas le personnage le plus complexe dans sa personnalité mais elle est bien celle dont l’histoire est la plus difficile à digérer si on veut.

Mais malgré le problème de traitement de ces deux personnages, le tout reste particulièrement bien raconté.

… le tout sous une narration maîtrisée

A en lire le résumé écrit au début de cet article, voir même rien qu’en regardant le générique montrant Hill House tel un labyrinthe, on pourrait penser que The Haunting fait partie de ces séries devant lesquelles on passe plus notre temps à se gratter la tête pour essayer de comprendre ce qu’il se passe qu’autre chose.

Mais n’ayez crainte, cette narration non-linéaire est tout à fait maîtrisée. Chaque épisode a un personnage central à tous les évènements qui y sont couvert. Ainsi, chaque épisode est l’exploration de la vie de l’un des membres de la famille Crain mis en parallèle avec ce qu’il (ou elle) a vécu à Hill House et ce qui a suivi ces évènements. On alterne donc entre le présent et le passé (les évènements de Hill House et après) de manière fragmentée mais le personnage au centre de l’épisode sert à chaque fois de fil rouge (ou de bouée de sauvetage si vous voulez) pour le spectateur.

Le tout fonctionnant finalement non pas comme un labyrinthe mais comme puzzle. Chaque personnage y amène ses pièces sur différentes parties du cadre global.

Les épisodes 6, 8 et 10 sont les exceptions qui confirment la règle (et le début de l’épisode 1 introduit tous les membres de la famille avant de se concentrer uniquement sur Steven). Le 6 car il s’agit du premier où l’intégralité des personnages sont tous ensemble (les « pièces » de l’épisode étant donc les moments passés et présents où ils étaient tous ensemble). Et les épisodes 8 et 10 car le puzzle est assez complet pour suivre tout le monde en même temps sur différentes périodes sans avoir besoin de bouée de sauvetage justement (l’épisode 9 entre ces deux-là amenant un point de vue particulier que je n’évoquerai pas pour ne pas spoiler).

Un montage fait pour créer du sens

Et évidemment, ce montage parallèle entre différentes époques n’est pas fait simplement en mélangeant n’importe comment les scènes concernant un personnage. En effet, les coupes d’une époque à l’autre ont systématiquement lieux à des moments où des associations thématiques (ou symboliques si vous préférez), visuelles et/ou sonores sont faisable entre les deux époques en question.

Par exemple, dans l’épisode 1, quand, dans le présent, le mari de Shirley tape sur un clou avec un marteau pour accrocher un cadre sur un mur, les bruits des coups de marteau se transforment peu à peu en les bruits que font Hugh (le père Crain) et M. Dudley (le concierge de Hill House) en ramonant la cheminée du manoir, dans le passé, amenant la coupe entre les deux époques.

L’exemple est ici assez évident mais d’autres transitions sont beaucoup plus subtiles comme des mots qui se répètent, des situations, des plans similaires ou en miroir l’un(e) de l’autre, des sujets de conversations et plein d’autres associations rendant les transitions entre époques non seulement fluides et cohérentes mais aussi souvent créant du sens. Pour l’exemple que j’ai choisi notamment, je laisse les adeptes de Freud interpréter cette association entre le mari et le père de Shirley. Et il y a de la matière avec tous les autres allers et retours dans le temps qui sont fait.

Des symboles forts … mais tellement essentiels à comprendre que l’univers parait inutilement compliqué sans eux

Et il y a une raison à un(e) tel(le) narration/montage : la thèse de la série est que nous ne sommes pas définis par nos choix, qu’ils soient passés, présents ou futurs. Nous sommes définis par là d’où nous venons. « Là d’où nous venons » étant le cocon familial, composé des parents, de nos frères et sœurs (quand on en a) et de la maison familiale (la « Forever House » plusieurs fois évoquée par certains personnages). Tout est presque déjà décidé à l’avance par ce cocon familial, l’ordre des évènements importe finalement peu. D’où une narration et un montage mélangeant les évènements, la série est en faveur d’une vision non linéaire du temps.

Et si j’ai évoqué que « tout est presque déjà décidé à l’avance » c’est parce que le message de la série n’est pas aussi désespéré et dépressif qu’il semble être à ce stade de l’analyse. Il y a une échappatoire : nous pouvons tout de même influencer le cours des choses dans le bon sens en faisant face à nos problèmes personnels.

J’aimerais entrer vraiment dans les détails pour vous prouver cette interprétation mais je ne peux pas le faire complètement sans spoiler.  

Cependant je peux vous orienter sur la bonne voie en vous disant simplement que c’est la fonction du personnage d’Eleanor de nous faire comprendre cette leçon plus que tous les autres. Puis en vous donnant un exemple (un petit peu plus tard).

La bonne compréhension de l’arc narratif d’Eleanor avec la « Bent Neck Lady » est essentielle à la compréhension du traitement symbolique des fantômes et du déroulement du temps dans la série… à défaut d’être l’arc le plus difficile à accepter

Rendu à ce niveau de l’analyse, il est fort probable qu’une partie d’entre vous ait compris où je voulais en venir quand j’évoquais le fait de « faire face à nos problèmes personnels ». Les « problèmes personnels » sont représentés par la figure du fantôme.  

Les fantômes sont partout : ils peuvent être la manifestation d’un traumatisme passé, d’un mal-être présent ou de la peur d’un potentiel futur. Il y a bien des explications concrètes à leurs apparitions mais il est important d’avant tout voir les fantômes de The Haunting sous cette lecture symbolique pour comprendre leurs actions qui peuvent paraître absurdes ou inconstantes. Ils sont tantôt menaçants, tantôt passifs, parfois ils vont interagir avec nos personnages de multiples façons quand parfois ils vont se contenter de passer à côté d’eux sans même les remarquer.  

Les fantômes sont même partout à l’image, cachés dans le fond du champ de plusieurs plans, hors focus. (Attention la vidéo ci-dessous contient des spoilers, revenez-y seulement après avoir regardé la série)

Les bonnes questions à se poser sur les différents fantômes ne sont pas « Qui est ce fantôme ? Pourquoi est-il là ? Que fait-il ? Pourquoi il fait cette action ? » mais sont finalement « Dans quel état psychologique est le personnage central à la scène à ce moment-là ? Pourquoi est-il dans cet état psychologique ? De quoi a-t-il peur ? ».

Et le manoir Hill House dans tout ça ? Hill House est une représentation sous la forme d’un lieu du cocon familial évoqué plus haut, qui nous définit en tant qu’individu et est à l’origine de nos problèmes personnels. Celui dans lequel nos parents cherchent parfois à nous retenir, dans lequel nous passons notre enfance. Cette enfance qui, ensuite, nous définit en tant qu’adulte. Et si j’utilise le terme « cocon familial » depuis le début (et je vais continuer de l’utiliser), c’est parce qu’il faut bien finir par en sortir à un moment ou à un autre, ne serait-ce que pour grandir.

Et c’est là que Hill House, le manoir hanté, devient une menace, en essayant de retenir les personnages à l’intérieur du cocon, en cherchant à les y emprisonner.

A ce moment-là de l’analyse, vous êtes surement un peu perdu, c’est donc le moment de vous donner l’exemple promis il y a quelques paragraphes. Laissez-moi donc vous parler d’un fantôme « mineur » de la série, que je peux vous décrire sans spoiler d’éléments scénaristiques majeurs : le « Tall Man ».

« The Tall Man » est un fantôme qui tourmente essentiellement le personnage de Luke, autant dans son enfance que dans son âge adulte. Il est autant dans le passé que dans le présent car finalement, l’essentiel des évènements (non pas absolument tous les évènements mais bien l’essentiel) est déjà décidé.

Son apparence est l’exact inverse de la place de Luke dans la famille. Luke est (avec sa sœur jumelle Eleanor) le plus jeune de la famille, donc le « Tall Man » est le plus grand, physiquement, des fantômes. D’ailleurs il s’assure bien d’être constamment le plus grand en flottant au-dessus du sol.

Il est d’abord attaché à Hill House et tourmente le petit Luke parce que ce dernier a trouvé, et s’est mis à porter, son chapeau. Chapeau dont le port a été validé par les parents, malgré le fait que l’objet soit trop grand pour sa tête, parce qu’il lui ira plus tard, en grandissant (ce que les parents disent quasiment mots pour mot).

Le « Tall Man » est donc associable à l’enfance de Luke et au cocon familial d’où il vient (le chapeau que Luke portait étant petit et la validation de ce port du chapeau par les parents). Cette association au cocon familial, commun à tous les enfants, permet d’ailleurs au « Tall Man » d’apparaître à d’autres personnages dans une ou deux scènes mais ce sera uniquement dans l’enceinte du manoir pour ces autres personnages.

Ici, le « Tall Man » apparaît à Steven mais c’est quand ce dernier est dans le manoir Hill House, le « Tall man » n’est pas aller chercher Steven à l’extérieur.

Le « Tall Man » va bien apparaître à l’extérieur de Hill House mais cela sera uniquement pour tourmenter Luke, qu’il va continuer de suivre. Pour le Luke adulte, le « Tall Man » est une représentation de son addiction à l’héroïne (en plus du reste évoqué plus haut). Il le suit partout où il va, et c’est ce qui explique son attitude passive. Comme l’objet d’une tentation, il ne fait rien de particulier, il se contente d’être là, constamment.

Toute cette fin d’épisode est probablement l’un des meilleur moment de la série

 La scène la plus parlante (dont est issue l’image ci-dessus) est surement celle montrant Luke marcher tout en comptant répétitivement jusqu’à 7 (le chiffre 7 représente la famille pour lui car c’est le nombre de membres) tandis que le « Tall Man », son addiction, le suit. Quand Luke s’arrête et se retourne il ne voit finalement pas le « Tall Man » mais une autre figure liée plus directement au cocon familial, là d’où il vient et le définissant en partie (qui l’a mis donc sur la piste de l’addiction à l’héroïne) : il voit sa mère (un personnage dont je m’efforce de parler le moins possible car, comme Eleanor, il est impossible de parler d’elle sans spoiler. Raison pour laquelle je ne l’ai jamais mentionnée avant).

Un autre élément important a relever : le fantôme disparaît après que Luke se soit retourné, après que Luke lui ait fait face, qu’il ait fait face à son problème d’addiction.

Avec cet exemple, vous avez normalement les clés principales pour lire les différentes symboliques et le fonctionnement des autres fantômes. Il vous suffit d’appliquer la grille de lecture en fonction de la psychologie des personnages confrontés aux fantômes et d’identifier quel est le problème que le(s) fantôme(s) de la scène représente(nt).

Comme je l’ai déjà mentionné avant, il y a aussi des explications concrètes au comportement des fantômes. Il y a aussi des explications concrètes au comportement du « Tall Man » et ce pourquoi Luke ne le voit pas en se retournant mais voit sa mère. Mais ces explications sont plus là pour justifier les apparitions des fantômes que pour les motiver (et il y a une nuance entre les deux).

On touche là le problème qui entraînera le sentiment d’incompréhension global et le potentiel rejet complet de la série qui ont été évoqués dans le court avis au début de l’article. Le problème est que les règles de l’univers sont comme soumises aux symboles et messages que Flanagan veut absolument faire passer dans sa série. Heureusement tout a une justification au bout du compte, je peux vous rassurer là-dessus, l’univers fait sens et est plutôt cohérent.

Mais entre les esprits de défunts qui font ce qu’ils veulent, les hallucinations, le « Twin Thing » (j’utilise le terme vague pour ne pas spoiler), le cas de la « Bent Neck Lady », les caractéristiques particulières du manoir Hill House et les pouvoirs de médiums de deux personnages, le monde de The Haunting est cohérent certes, mais il part un peu dans tous les sens.

Toutes ces règles de la diégèse, qui s’ajoutent au fur et à mesures, risquent fortement de créer une indigestion chez le spectateur arrivé à la fin. Flanagan empile les règles sur son univers pour tout justifier constamment. Ce qui est à la fois admirable car c’est un signe d’application pour concilier symboles et univers cohérent. Mais c’est aussi une marque d’une maladresse globale, la série aurait grandement gagné à être plus « simple », plus concise dans le monde qui est créé et dévoilé au spectateur.

Je plains un peu le spectateur non averti qui se lance dans The Haunting of Hill House sans vraiment savoir à quoi s’attendre et peut, potentiellement beaucoup apprécier tout comme il peut passer un très mauvais moment une fois arrivé à la fin, devant cet univers qui peut paraître inutilement compliqué si on ne saisit pas l’ensemble des symboliques qu’il y a derrière cette complexité.

Peut-être alors que la très bonne mise en scène peut aider.

Une mise en scène de haut vol

La première chose à noter sur la mise en scène c’est qu’elle aide grandement à comprendre les symboliques quand on s’y intéresse car elle y participe.

J’ai déjà parlé en détail du montage, mais il faut aussi noter le fait que certaines couleurs ont du sens. A commencer par le bleu, associé à ce qui ne fait pas vraiment partie du manoir Hill House, ce qui n’est pas sous son contrôle direct. Raison pour laquelle les Crains, ont tendance à s’habiller dans des dominantes de bleue.

Et pour une raison particulière, la série va parfois briser elle-même cette « règle du bleu » mais je vous laisse chercher vous-même les quelques moments où ça arrive et pourquoi.

Le bleu s’oppose, naturellement, au rouge profond. Je ne vais pas aller dans les détails des sens de la couleur rouge, l’opposition au bleu est assez parlante comme point de départ d’interprétation et il vaut mieux découvrir soi-même (surtout une fois que l’on a les clefs des symboliques) les subtilités du sens de cette couleur.

Quand on pense au rouge, on peut penser à la violence, les passions (utilisations les plus communes en fiction), à l’opposition au bleu évoqué plus haut et, évidemment, à cette porte mise en valeur dans le générique. Je vous laisse trouver les très nombreuses implications de ces interprétations en regardant la série.

Aussi, le blanc immaculé (ou « pur ») est assez absent de la série dans son ensemble. Il n’est présent que dans des lieux et/ou sur des vêtements très spécifiques, et là aussi, il vaut mieux découvrir soi-même la raison, le sens de ce traitement du blanc.

Au-delà du sens des couleurs, la série jouit d’une photographie assez unique, participant grandement à l’ambiance globalement sombre tout en réussissant à être particulièrement agréable et douce à certains moments.

Les noirs sont bouchés, ce qui se prêtes à de forts contrastes normalement, mais pas ici, les couleurs ne sont pas si pétantes et les lumières ne sont si intenses. Les couleurs vont aussi presque constamment englober l’image sans forcément tomber dans le monochrome complet non plus, ou du moins pas tout le temps (d’où le fait que quand il y a du blanc immaculé à l’image c’est bien par choix). L’image a ainsi un aspect assez éthéré quasi constant. Le tout m’est, je l’admet, difficile à décrire avec des mots donc je vous laisse constater cette photographie par les images.

Le tout créant une véritable patte à l’image quasiment unique (la seule autre production que j’ai vue avec une telle image était le film Doctor Sleep… réalisé par Mike Flanagan justement).

A cela ajoutez: des plans particulièrement composés, esthétiques, parfois véhiculeurs de sens (je ne vais pas le montrer ni le décrire car cela serait spoiler mais il y a un plan tout bête dans l’épisode 2 qui, à lui tout seul, quand on est au courant des tenants et aboutissant du scénario, vend complètement la mèche tellement il est lourd de sens) ; La manière qu’a la série de cacher des fantômes un peu partout (voir le lien mis bien plus haut, à voir uniquement si vous avez déjà vu la série) ; Un travail du plan séquence absolument vertigineux dans l’épisode 6 (encore une fois, là pour le sens, c’est la première fois que tous les personnages sont réunis, donc ils ne sont donc pas séparés par les coupes) ; Des jump scares particulièrement bien placés ; Un travail du plan de face associé à un lent zoom avant sur des personnages secondaires/tertiaires décrivant des faits morbides ; Et enfin des images comme l’avant dernier plan de l’épisode 1 qui donneront de véritables cauchemars à certains par leurs efficacités horrifiques.

Ainsi, vous avez The Haunting of Hill House, une série en substance (évitons le mot « objectivement ») tout simplement excellente à presque tous les niveaux. Une réalisation (comme nous venons de le voir) au poil, créant une superbe ambiance horrifique et dramatique. Une écriture qui n’est pas parfaite mais est globalement réussie. Ainsi qu’une énorme force émotionnelle globale grâce à ses symboliques… du moins si on les saisit.

Le principal problème de cette série étant que comprendre ces symboliques est essentielle pour l’apprécier pleinement. Un visionnage à 100% premier degré et centré sur le concret donnera une expérience forcément laborieuse et décevante.

Mais si vous êtes en train de lire ces lignes c’est que vous avez, normalement, lu l’analyse détaillée et que vous avez désormais les clés essentielles pour véritablement apprécier The Haunting of Hill House.

Je peux, alors, retirer mon masque de mesure utilisé dans l’avis court pour celles et ceux qui ne voulaient pas lire un article d’analyse un peu lourd j’en conviens.

Je vous recommande chaudement cette superbe, bien qu’un peu maladroite, saison 1 de The Haunting of Hill House dont la saison 2 est en cours de production en ce moment même.

Reste à voir ce que cela donnera (à suivre dans la critique de la saison 2).

Critique écrite par Hugo REMY

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